Histoire : Originaire des Juifs de Tunisie
La présence juive en Tunisie est attestée dès le IIIe siècle avant notre ère, depuis l’époque des Macchabées après la destruction du Premier Temple ; pour la communauté des Juifs de Djerba qui a une histoire particulière, des Cohanim se seraient installés selon la légende la plus courante, après la destruction du Temple de Salomon par les Babyloniens emportant avec eux une des portes et quelques pierres du Temple qui ont été incluses dans la plus ancienne synagogue hors d’Israël, celle de la Ghriba. Par la suite la communauté s’est renforcée par diverses vagues d’immigration, notamment à la suite de la destruction du Deuxième Temple par Titus en 70 de notre ère qui aurait déporté à Carthage près de 30 000 Juifs. Leur nombre se développe à la suite de vagues d’immigration successives ce qui, pour certains, serait la principale partie proviendrait du prosélytisme des peuples de la région créant des communautés de Berbères juifs et pour d’autres plutôt d’une origine en majorité judéenne.
C’est au IIème siècle que la présence des Juifs devient incontestable en Tunisie, facilitant ainsi l’apparition du christianisme. Tertullien, un écrivain né à Carthage entre 150 et 160, de langue latine issu d’une famille indigène romanisée et païenne qui se convertit au christianisme à la fin du IIᵉ siècle relate le plus ancien témoignage de la coexistence des païens judaïsant d’origine punique, romaine et berbère et souligne la coexistence initiale entre Juifs et Chrétiens. Pour ce qui concerne la pratique religieuse, les cérémonies accueillent régulièrement des chrétiens et des païens dont certains se convertissent en respectant partiellement la loi juive (ger toshav), puis ce sont leurs enfants qui réalisent totalement leur conversion (ger tsedeq). De la même époque date une plaque en marbre blanc trouvée à Carthage. Les symboles juifs qu’on y distingue sont nombreux : des loulav, ethrog, shofar et des chandeliers à sept branches et surtout « Chalom » écrit en hébreu.
Le nombre de personnes qui vont vers l’adhésion au judaïsme pousse les autorités à vouloir freiner cet essor. Le Talmud de Jérusalem témoigne aussi de la présence de plusieurs rabbins de Carthage comme Rabbi Isaac, Rabbi Hanan et Rabbi Abba. La découverte de preuves archéologiques comme, entre autres, la nécropole juive à Gammarth au nord de Carthage qui était la capitale de l’Afrique romaine. Le cimetière était composé de 200 chambres mortuaires creusées dans la roche et contenait chacune 17 complexes de tombes que l’on croyait puniques mais que le Père Delattre a montré qu’il y avait des Juifs par la présence de symboles et d’inscriptions notamment en hébreu et en latin.
Une synagogue datant du IIIème ou IVème siècle a été découverte en 1883 à Hammam-Lif (ancienne Naro), à quelques kilomètres au sud-est de Tunis. Au sol de la salle principale, une mosaïque qui comporte une inscription latine sancta synagoga naronitana (sainte synagogue de Naro) (photo), confirme la présence d’une communauté juive mais aussi de l’aisance financière de ses membres qui reproduisent alors des motifs pratiqués dans toute l’Afrique romaine, démontrant de fait la qualité de leurs échanges avec les autres populations. D’autres communautés juives sont attestées à Thusuros (l’actuelle Tozeur) et à Kelibia par une mosaïque représentant des menorot est découverte en 2007 par l’Institut national du patrimoine et qui remonterait au Ve siècle.
Toutefois, le développement de la communauté juive est freiné par des mesures anti-juives à partir de l’an 313 avec l’acte qui marque la reconnaissance de la religion chrétienne comme culte légitime dans l’Empire romain.
Alors que la capitale Tunis est une ville populeuse et prospère, Kairouan devient pour sa part un centre important pour les Juifs orthodoxes, fidèles aux interprétations et nuances halakhiques établies au cours des siècles émanant de la Torah écrite et de la Torah orale.
Quand, au VIIème siècle, arrive la conquête arabe de la Tunisie, les Juifs passent par des périodes de relative liberté voire même de développement culturel puis à des phases de discrimination plus fortes. Cependant, une deuxième vague de Juifs arrive à la fin du siècle et près de quatre mille Juifs émigrent venant d’Égypte que le gouverneur Abd al-Aziz a envoyé suite à la demande de son frère, le calife de Tunisie, Abd al-Malik.
Avec l’islamisation de la Tunisie, les populations juives subissent gouvernance musulmane devenant des citoyens protégés sous le règne des dynasties aghlabides puis fatimides, mais de seconde zone empêchant les synagogues d’être aussi hautes que les mosquées avoisinantes, les Juifs de monter des chevaux, qui sont uniquement réservés aux Arabes, mais seulement des ânes ou des mulets, des animaux moins nobles, de posséder une arme et porter des vêtements distinctifs et reconnaissables.
Pourtant cela n’empêche pas les Juifs d’avoir une activité économique prospère ; la communauté se structure et nomme des dirigeants, des intellectuels rayonnent et des savants sont appréciés dans le monde.
La communauté juive qui a compté jusqu’à 120 000 membres en Tunisie jusque dans la fin des années 50 ne compterait plus aujourd’hui qu’environ 1000 personnes dont la majorité se situerait à Djerba.
Si vous souhaitez en savoir plus, je vous invite à allez sur le blog de Jean-Pierre Allali sur le site du CRIF qui a écrit un article sur les Juifs de Tunisie jusqu’à nos jours.
Esther Attal